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Jean QUENTEL, Abbé (1892-1965)

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Jean QUENTEL

Il y a 130 ans, le 24 septembre 1892, naissait à la ferme de Kerarc’hallorc’h à Gouesnou, Jean QUENTEL,  5ème enfant d’une fratrie de 12 enfants « au sein d’une famille nombreuse et pieuse où les vocations sacerdotales sont traditionnelles à toutes les générations », comme le soulignait son ami le Chanoine Penchréach qui prononça son oraison funèbre.

La Bretagne et le Finistère en particulier, sont alors des bastions catholiques, grandes pourvoyeuse de forces vives pour l’église. La tradition religieuse imprègne la vie quotidienne de la famille avec, ce qui est moins fréquent alors dans ce monde rural, une attention forte pour « l’instruction » et les études des enfants. Son frère René deviendra tout comme lui abbé. Agriculteurs ou intellectuels, parfois les deux, la curiosité est un axe fort de cette famille comme en témoigne la précieuse correspondance de son oncle Yves-Charles Quentel qui dépeint et commente, avec une précision quasi ethnographique, son expérience de soldat durant la guerre de 1870 (Revue Gwéchall Le Finistère autrefois - Tome 1 et 2).

Ce goût pour l’écrit semble être une tradition familiale. Un siècle auparavant, l’arrière-grand-père, Félix Quentel, agriculteur, représente, avec 3 autres électeurs de Lambézellec, le Tiers-Etats lors de la rédaction des cahiers de doléances de 1789 de la sénéchaussée. Félix sera également « juge de paix ».   

Si beaucoup de ses oncles sont agriculteurs, deux autres sont notaires et Jean côtoie également assidument  un  autre des jeunes frères de son père, Joseph, dit Job, curé de Lampaul-Plouarzel. Cet ancien élève de l’institut de Catholique de Paris, licencié en histoire et géographie, est un intellectuel féru de philosophie. Initié à l’hébreu, à l’assyrien et à l’égyptien, Joseph a présenté en 1903 à Rennes un mémoire sur « Les rapports entre les Mystères païens et le Christianisme », sujet de doctorat qui lui vaudra la proposition d’une chaire d'Egyptologie à l'Institut Catholique de Paris mais à laquelle sa santé vacillante ne permettra pas de répondre.

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Mais revenons à Jean. Son père, François, a quitté le creuset familiale de Kervao à Lambezellec pour épouser  Marie Jeanne Crozon et s’installer, dès 1883, dans la ferme de Kerac’halorc’h.  En cette fin de XIXème siècle, l’enfance de Jean est sereine au sein d’une famille qui s’agrandit d’un enfant chaque année ! Il a deux ans lorsque décède son oncle Yves-Charles des suites d’une blessure de guerre, une histoire étonnante de balle perdue, miraculeusement encastrée dans de la boucle de son ceinturon.

 

 

C’est sans doute cet oncle brillant qui poussera Jean vers le grand séminaire tandis qu’un environnement familial ouvert attisera une grande curiosité qu’il ne cessera d’éprouver tout au long de sa vie.  Jean suit un avec aisance un parcours scolaire classique : école primaire à l’école libre de Guipavas, études secondaires au Kreisker à St Pol de Léon, noviciat au grand séminaire de Quimper. Il est ordonné prêtre en 1916 par Monseigneur Duparc.

Jean QUENTEL

La première guerre mondiale est déclarée. Vicaire auxiliaire de Lambézellec, Jean est professeur au collègue Bon‐Secours à Brest. Ce grand sportif, en plus de sa fonction de professeur d'histoire et de géographie, est aussi « lieutenant au sport » tout en développant sa sensibilité artistique. Un véritable touche-à-tout !

                                                                                                                                                                           

La vie religieuse ne sera pas pour lui une vie de sédentaire. Les pèlerinages sont l’occasion de voyages, parfois lointains. En 1934, Jean embarque à Marseille à bord du Patria pour un pèlerinage de 42 jours  qui le mènera d’abord en Egypte, au Caire et à Gizeh où il ne manquera pas l’ascension de la pyramide de Chéops ! Treize jours à Jérusalem, un jour à Bethléem. Retour vers le nord par Nazareth, le Thabor, Tibériade, Capharnaüm en Galilée, la Syrie avec Damas, le Liban avec Baalbek…  Embarquement à Tripoli sur le Félix‐Roussel et après quelques escales diverses, retour à Marseille, auprès de Notre‐Dame de la Garde. Un crochet à la Sainte‐Baume, un autre à Lourdes, un dernier à Saint‐Aubin du Cormier avant le retour à Brest.

 

1936, changement de cap.  Jean est nommé aumônier de l'Hôpital Maritime de Brest. Cet univers médical et militaire sied parfaitement au nouvel aumônier. Il a tout juste prit ses marques que sa curiosité insatiable sera comblée, bien malgré lui, par l’actualité nationale.

 

Le 16 septembre 1936, le trois-mâts vapeur le Pourquoi-Pas? fait naufrage à Aftanès en Islande. Tout l’équipage de ce navire scientifique, soit 17 marins et 6 savants, périssent dans une terrible tempête d’équinoxe. Avec eux disparaît l’une des figures de l’exploration française, Jean-Baptiste Charcot, le « gentleman polaire ». La nouvelle bouleverse la France et avant l’extraordinaire hommage national qui lui sera fait à Paris, Il faut rapatrier les 22 corps, 18 autres s’étant perdu dans la tempête.

C’est l’Abbé Quentel qui sera désigné par les autorités maritimes pour présider aux cérémonies religieuses. Embarqué à Cherbourg à bord de  « l’Aude », pour un voyage qui ne devait être qu’un simple aller-retour, il faudra huit jours à l’équipage pour atteindre la destination. La tempête persistante oblige l’Aude à rester à l’abri dans le port. Jean est alors accueilli par l’Evêque de Reykjavik, à l’évêché, où il y séjournera quelques jours.

 

Une cérémonie  grandiose est organisée dans la cathédrale de Reykjavik, présidée par l’évêque avec l’ensemble des prêtres et pasteurs de l’ile. C’est une journée de deuil national pour tous les habitants de la capitale. La messe est radiodiffusée à l’intention des familles qui peuvent bien sûr suivre la cérémonie de leur lointaine Bretagne (sur les 34 marins, 31 étaient bretons).

 

Après la cérémonie, Jean profite de l’immobilisation du bateau pour découvrir l’Islande, ses geysers et ses mares d’eau chaudes le long des routes défoncées.  La tempête  calmée, le bateau pourra reprendre son voyage de retour. Après des funérailles nationales à Notre Dame de Paris, Jean-Baptiste Charcot est enterré au cimetière de Montmartre  le 12 octobre 1936. 

 

Jean reprend ses fonctions d’aumônier à l’hôpital maritime tandis que bientôt, les rumeurs de la guerre se font entendre. Quatre ans plus tard,  c’est dans une ville désormais tenue par les allemands que Jean poursuivra ses offices.

Lorsque les grands bombardements déferlèrent sur Brest, au premier son de la sirène, Jean revêt son casque et à pas de géant gagne son Hôpital pour recevoir les convois de blessés et souvent aussi de morts. Comme le témoigne le Chanoine Pencreac’h « sa fidélité au devoir, son mépris du danger provoquèrent l'admiration de tous, depuis le Médecin général jusqu'aux médecins traitants, au personnel infirmier et à tous les malades ». Il reçoit en 1952 la Médaille d'honneur du service de santé des armées mais n’en parla pas. Il faudra l'inventaire de sa maison pour que la famille et les amis le découvrent après sa mort.

 

Féru d’histoire, Jean avait au fil des ans, constitué une  précieuse collection de livres, document anciens, parchemins et même manuscrits. Les bombardements sur Brest s’intensifiant, il prend la précaution de les rassembler dans quelques grandes malles qu’il entreposa, pensait-il en sécurité, dans le grenier de la maison familiale de Gouesnou.

 

Mauvaise pioche ! Août 1944,  Gouesnou est le théâtre de violents combats entre américains et allemands et la ferme est incendiée lors de la bataille de Fourneuf. Sa bibliothèque et ses archives historiques disparaissent dans les flammes.  Un comble : le presbytère restera intact,  épargné de la destruction tout comme le quartier de St Martin, peu touché par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale.

Jean était aussi artiste. Tout au long de sa vie, il affuta son goût de la sculpture sur bois, qu’il commença à développer à Bon‐Secours. Bien qu’autodidacte, il acquiert une bonne aisance et rapidement les confrères, amis, collègues et bien sûr la famille se verront offrir qui un crucifix, un buste, une statuette de saint ou de sainte qu’il ne manque pas de réaliser à chaque baptême des neveux et nièces. Il ne craint pas de s’attaquer à des sculptures de grande taille qui orneront chapelles et églises, notamment celle de Gouesnou où un majestueux Saint Gouesnou accueille le visiteur sur un pilier près du porche. Une vierge est également visible à la chapelle de l’hôpital maritime de Brest.

 

En 1944, Jean a 52 ans. Il est nommé recteur de Mespaul. Il resta 20 ans, jusqu’à la fin de sa vie dans cette modeste paroisse qu’il marqua de son charisme et de sa bonté naturelle.

J’ai 2 ans et demi quand il décèdera en 1965. Bien que très jeune, je garde un souvenir précis d’un moment furtif avec lui : je regarde, sans doute impressionné, cet homme immense dans sa soutane noire se pencher vers moi et m’offrir une petite balle de rouge que je perdrai le lendemain dans une haie de la cour des maternelles de l’école Sainte Jeanne d’Arc…

En 2012, une exposition fut organisée lors de la foire Sainte-Catherine à Mespaul, puis à la ferme Quentel où des dizaines de ses œuvres furent exceptionnellement réunies par la famille durant une journée.

Jean est enterré à Gouesnou, dans le caveau familial.

Jean-Marc Quentel – 1er novembre 2022

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Jean QUENTEL

Des geôles de Rochefort…à la mairie de Gouesnou.

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Prison Saint-Maurice à Rochefort

Le 31 janvier 1795, Matthieu de Bergevin, quitte la prison de Saint Maurice à Rochefort après 15 mois de détention. Rien ne le laisse penser que 31 ans plus tard, il deviendra le maire de Gouesnou. A ce moment, il pense simplement qu’il est bien heureux d’avoir évité la guillotine. Il a eu plus de chance que son frère Pierre-Marie exécuté place du château à Brest avec 25 autres administrateurs du Finistère le 22 mai 1794. 

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Alors que Matthieu commandait la corvette La Vigilante, bâtiment chargé de l’escorte des convois de Brest à Bordeaux, il fut dénoncé par le commandant de la corvette Fille Unique, bâtiment stationnaire de la Gironde. Ce dernier déclara que Bergevin avait favorisé « l’évasion des conspirateurs Guadet, Pétion, Wimphen et autres. » Sans même vérifier ces dires, la Convention donna l’ordre d’arrêter notre futur maire. Ce qui fût fait, en pleine mer, le 31 octobre 1793.

L’affaire était grave. Guadet, Pétion et ses confrères avaient été mis hors la Loi le 2 juin 1793. Ces députés Girondins, anciens proches de Robespierre pour la plupart, avaient eu le tort de désapprouver le « virage sanguinaire » de la Terreur. La Convention cherchait par tous les moyens à les arrêter pour les guillotiner. Il s’avéra en fait que Matthieu était innocent des faits qui lui étaient reprochés. En effet, Charles Belval, commissaire de Marine, arrêté, quelques mois après Matthieu, comme Fédéraliste, l’avait mis hors de cause dans une lettre adressée au tribunal révolutionnaire de Brest. Il avouait qu’il avait lui-même permis aux conspirateurs d’embarquer en rade de Brest sur l’un des bâtiments de queue de convoi de Bergevin.

Le Comité de Salut public mettra des mois à reconnaître son erreur et à libérer Matthieu. Sans rancune, il continuera à servir la Marine du Directoire, du Consulat puis de l’Empire. Même s’il ne fut jamais au centre de grands faits d’armes, il servira plus qu’honorablement en commandant successivement divers vaisseaux lors de l’expédition d’Irlande en 1798, également dans l’escadre de l’amiral Bruix en 1799 ou encore dans l’expédition malheureuse de reconquête de Saint-Domingue sous les ordres de l’amiral Villaret-Joyeuse (1801-1802). Mis à la retraite d’office en 1817, il sera fait Amiral honoraire un an plus tard. En 1826, sous Charles X, il est nommé maire de Gouesnou sous la bannière des « Ultra ». La révolution de juillet 1830 aura raison de sa mandature…mais là, c’est une autre histoire.

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Blason des Bergevin

Pierre à Cupules de Kergaradec.

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En matière de vieilles pierres, la pierre à cupules (du latin cupula : petite coupe) de Kergaradec, est sans doute une des moins connues des Gouesnousiennes et Gouesnousiens. Elle se trouve au coin d’un carré de pelouse, tout de suite à gauche lorsqu’on quitte la rue Emile Roux pour rejoindre la rue Kergaradec-Bras. Cette pierre témoigne d’une activité humaine en ce lieu à l’époque Néolithique (environ – 6000 avant J-C), mais sa fonction reste un mystère. Pour certains elle marquerait l’endroit d’une nécropole, pour d’autres les cupules représenteraient des constellations ou des parties du corps humain, pour d’autres enfin elle est associée à des pratiques rituelles : offrande funéraire ou bien culte de l’eau. Autant les menhirs, les dolmens, allées couvertes ou tumulus sont légions en Bretagne, autant les pierres à cupules sont rares. On en dénombre moins d’une dizaine dans tout le Finistère.

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Historique du Musée

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Le bâtiment appelé Musée du Patrimoine est l’ancien patronage paroissial. C’est Pierre Joncour, recteur de Gouesnou de 1908 à 1912, qui l’a fait construire et bénir le dimanche de Pentecôte 1909. Ce bâtiment et le terrain sur lequel il est construit appartiennent actuellement à l’Association Immobilière de Cornouaille et du Léon, qui gère les biens paroissiaux sous l’égide de l’évêché.

En 1921, le patronage se constitue en Association d’Education Populaire, avec ses statuts, déclarée en sous-préfecture sous le nom de patronage Sainte Jeanne d’Arc et inscrite au journal officiel le 8 décembre 1921.

A l’origine, ce bâtiment consistait en une seule grande salle. Elle a été d’abord utilisée comme toute salle de patro, mais très vite, elle a aussi servi d’école pour les garçons en attendant l’ouverture sur un terrain à l’arrière, de l’école sainte Jeanne d’Arc en 1937. 

De septembre 1914 à mai 1915, des soldats d’un régiment de Beauvais venus se reposer à l’arrière de la ligne de front, après les premiers combats meurtriers sur la frontière belge, y ont été logés.

Elle a aussi servi de salle de spectacle pour du théâtre et du cinéma. Le matériel scolaire devait donc être déménagé puis remis.

De juin 1940 à l’année scolaire 1942-1943, ce sont les Jeunesses Hitlériennes qui s’y sont installées.

Après la guerre, elle a encore servi d’école, car l’école sainte Jeanne d’Arc s’est vite révélée trop petite, et les travaux d’agrandissement réalisés par des bénévoles ont traîné jusqu’en 1954.

Par la suite, elle a toujours servi de salle de patronage jusqu’au début des années 70, les gradins ayant été enlevés en 1967-1968, les représentations théâtrales et les séances de cinéma ne s’y tenaient plus.

Ensuite elle a servi de salle de sport pour l’école Jeanne d’Arc, de lutte bretonne et de judo pour des associations communales. Des modifications ont dû être apportées dans les années 80 pour faciliter l’accès et le confort du public.

Depuis 1999, ce bâtiment est affecté à l’Association des Amis du Patrimoine, sans local fixe depuis sa création en 1987, pour en faire un musée. La mairie le loue à l’Association Immobilière de Cornouaille et du Léon, représentée par la paroisse. Une convention qui définit les droits et devoirs de l’Association envers la mairie a été établie et une subvention est versée comme à toutes les autres associations communales.

Ce musée a une réserve attenante, à l’arrière du bâtiment. Sa construction est postérieure à celle du patronage. Elle a servi d’abord au projectionniste à partir de 1952, puis au Frère  Le Jeune, directeur de l’école Jeanne d’Arc qui s’en servait comme logement, enfin aux institutrices, comme salle de réunion et de détente, jusqu’à ce que les deux écoles privées soient regroupées sous le seul nom d’école saint Joseph, au bourg, rue des Ecoles, dénommée actuellement rue Sœur Paul 

Les murs de ce bâtiment sont tous porteurs d’une période de l’histoire de la commune mêlée à celle de la paroisse. Pour de nombreux Gouesnousiens, ils sont encore animés par le souvenir de tous ceux qui s’y sont succédé depuis plus d’un siècle. C’est le bâtiment idéal pour un musée communal.

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